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mercredi 17 avril 2013

Kokyu et Ki

Ce texte fait écho avec l'article de Ivan Bel " L'énergie en Aïkido " que je vous recommande.
avril 2013.

Kokyu, traduit par « respiration », est un principe qui englobe l'échange et la circulation du Ki, énergie considérée comme naturellement merveilleuse ou relevant d'un mysticisme ésotérique. Si Kokyu et Ki sont intimement lié en Aïkido, nous pouvons faire le constat que la dimension du Ki est très souvent oubliée, ou presque totalement oubliée, dans son enseignement et sa pratique.

 

Pour Maître Morihei Ueshiba, le Kokyu est le "flux d'une énergie sans cesse en mouvement " et fait référence " au flot de puissance que donne la maîtrise du temps d'attaque, dans le rythme de la respiration."
Kokyu peut être traduit par le "mouvement du corps suivant le Ki ", énergie potentielle du, ou dans, le corps. Sans Kokyu, la circulation du Ki ne peut se réaliser. La respiration y est aussi importante que l'échange et le rythme. Lorsqu'ils s'harmonisent, le Kokyu s'active alors. 

Pour ma part, j'ai toujours eu l'intime conviction que l'Aïkido (Union – Énergie – Voie) devait permettre au faible de l'emporter sur le fort, physiquement parlant. D'un gabarit plutôt "costaud", j'ai été surpris de voir comment certains Senseï, ou de simples et sincères pratiquants plutôt frêles réussissaient à me déséquilibrer sans utiliser leur force physique et notamment sur Kokyu Hoo [exercice de Kokyu] en Seiza, position plus stable que debout. Lorsque l'on pratique avec un Senseï ou un Sempaï, on peut ressentir une forte présence, toujours sans force physique, qui prend corps en nous et nous contrôle sans grand effort. Certains Senseï n'ont même plus besoin d'un contact physique pour établir ce type de « connexion » et leur Kime [attitude déterminée du corps et de l'esprit] suffit amplement à vous imposer un contrôle dans l'espace-temps.


Mon meilleur ressenti à ce jour reste le contrôle qu'exerça Feu Nishio Senseï sur moi sur un Irimi Nage qui avait " cristallisé " ma colonne vertébrale en me posant le pouce sur la nuque et qui attendit gentiment que je développe mon Ukemi avant de me projeter tout en douceur car la moindre petite accélération ou pression de sa part aurait pu rompre aisément une ou plusieurs de mes vertèbres. C'était à Boulouris en 1997 et c'est une expérience qui ne s'oublie pas.

J'ai eu la chance à mes débuts en Aïkido d'avoir les conseils d'un Sempaï, médecin homéopathe-acupuncteur, qui a attiré mon attention sur les micro-traumatismes inutiles que l'on pouvait subir ou faire subir. Ayant eu des problèmes aux genoux, il m'orienta vers une pratique respectueuse des axes morphologiques et un usage " sans force brutale " du corps. Cette approche thérapeutique de la pratique ne m'a jamais quitté et je lui dois beaucoup sur ma compréhension de la pratique de l'Aïkido et plus généralement de celle du Budo.

Le Ki est une énergie considérée comme cosmique ou divine selon ses propres convictions. Chaque être qu'il soit animal, végétal, minéral, ou même éther, toujours selon ses propres convictions, en possède et cette énergie circule dans et autour de nous.

Déjà sensible à la notion d'Énergie depuis mon enfance, je n'ai pas envers cette notion ni de blocage mental ni de rejet et j'ai pratiqué l'Aïkido en suivant les axes qui représentent, pour moi, les vecteurs vers la compréhension du Ki : un travail sans force musculaire, un respect des axes morphologiques du corps et la juxtaposition de la respiration jamais forcée.
Mes recherches m'ont amené à comprendre que la contraction musculaire est un frein à l'expansion du Ki interne vers l'extérieur du corps, mais elle n'empêche pas le Ki externe d'y pénétrer : c'est pourquoi celui qui est saisi peut envoyer du Ki à celui qui saisit. Aussi, celui qui saisit ne doit pas le faire en contraction (Gyakute) mais en extension (Honte), tout comme pour la saisie d'un Ken avec Shimeru (sensation " d'essorer " la poignée du Ken).


Dans Kokyu Hoo de l'Aïkido et l'Aïki Age du Daïto Ryu, lorsque le corps est bien positionné : épaule relâchée, buste droit, coude devant les hanches, Tegatana [tranchant de la main] dans l'axe de l'avant bras ; il est possible de fléchir les bras sans contracter ses muscles. Qui plus est, il est possible de dépasser largement son potentiel de force " musculaire " et de renverser un partenaire plus fort.

La posture du corps est d'une grande importance, mais l'intention créée dans et par l'Esprit a un rôle primordial car elle permet de diriger le Ki dans et au-delà de son propre corps par un processus de visualisation mentale.
Ainsi dans l'exercice du Kokyu Hoo, il est possible de se " fixer " dans le corps de l'autre et de créer un point de " pression " que ce soit sur le centre de gravité, l'épaule ou le coude de son partenaire. Selon les conseils de pratiquants ayant une connaissance approfondie dans une discipline ciblant le travail du Ki ou de thérapeutes confirmés, il est important de ne jamais se fixer sur aucun organe vital.

Les sensations développées sur Kokyu Hoo sont ensuite applicables à toutes les techniques, même si parfois la dynamique de travail en efface un peu la lecture. Toute technique Aïki appliquée sans Kokyu n'est plus que Jutsu et reste limitée dans son application.


L'Aïkido nous permet de "toucher du doigt" le Ki, de le reconnaître (dans le sens de renaître avec) et de le partager. Il faut des années de pratique pour que le corps digère ce que l'intellect croit comprendre. La simple pratique "sportive" ne le permet pas et il faut aller chercher une résonance en Soi et en l'autre, ce qui est possible si l'Esprit accompagne la pratique.

Le Kokyu Rokyu [force développée par le Kokyu] est très efficace... avec les moins gradés que soi. Dès que l'on a à faire à un plus gradé, il faut revenir à une technique plus basique (retour aux fondamentaux) car tout se passe comme si l'ancien avait une énergie plus condensée, ce qui le rend plus lourd même s'il fait une taille et quinze kilogrammes de moins.
J'ai été étonné d'apprendre que des enseignants ne font jamais pratiquer Kokyu Hoo. Quand on voit pratiquer les techniques en force, force est de constater que la dimension du Ki y est absente. Aussi que restera t-il de la pratique lorsque le corps aura perdu de sa vigueur ?

Quand on a eu la chance d'être passé dans les mains de Senseï ou Sempaï qui ont perdu leur masse musculaire et qui sont capables de vous maîtriser, corps et âme, avec un doigt (ou presque), on ne peut ignorer que le Ki a un rôle primordial dans la pratique de l'Aïkido.


Éveillons-nous à cette conscience du Ki et permettons-nous une relecture du principe Aïki.

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