" Si le Judo consiste à neutraliser un adversaire... l'Aïkido est nettement plus agressif. Tous les coups sont en effet permis... À l'inverse du Judo, on ne se laisse pas saisir, on se débarrasse immédiatement de l'adversaire pour le détruire... On voit toute la différence avec le Judo nettement plus pacifiste... Alors qu'en Judo les principes pratiques sont : déséquilibre, construction du mouvement, terminaison, en Aïkido, ces derniers sont : contact, douleur, déséquilibre et projection si besoin est." Extraits de la "Revue Française du Judo" du 15 janvier 1952.
Voilà ce qui ressort de la toute première démonstration de Mochizuki Hiroo, devant les professeurs de Judo. Cette description est loin de l'idéal pacifiste et de la philosophie que l'on connaît aujourd'hui de l'Aïkido et, voire même, en décrit son contraire. Plus tard, il sera dit que les techniques présentées étaient de l'Aïki-Jujutsu (techniques martiales de l'Aïki).
Il est intéressant de voir comment l'Aïkido a été perçu et interprété par les premiers observateurs français. Cependant l'Aïkido de 1950 n'était pas encore celui des années 60, Ô Senseï Moriheï Ueshiba évoluant de manière exponentielle dans l'épuration du geste technique en rapport avec ses convictions philosophiques comme religieuses.
Hiroo Mochizuki confiera plus tard: " À dire vrai, j'ai eu quelques problèmes avec Maître Ueshiba ". En le retrouvant, il lui avoua avoir fait des compétitions et constaté qu'il était difficile de gagner en utilisant seulement les techniques d'Aïkido et affirma : " je suis obligé de conclure que les techniques du Daïto Ryu Jujutsu ne suffisent pas dans toutes les situations ". Ô Sensei le sermonna : " Tu ne parles que de gagner ou perdre...ne comprends-tu pas que nous ne sommes plus à une époque où nous pouvons parler de victoire ou défaite ? Nous sommes rentrés dans un siècle d'amour ".
Hiroo Mochisuki, fils du grand Minoru Mochizuki, fondera plus tard le Yoseikan Budo, synthèse de Judo, de Karaté, d'Aïkido et de techniques d'armes, principalement issues de la tradition du Katori Shintô Ryu. (Il réside dans le sud de la France et son école connaît un bon succès).
Nous pouvons constater que l'Aïkido était basées sur les techniques du Daïto Ryu. Peu de temps après cette démonstration, c'est Maître Tadashi Abe, délégué de l'Aïkikaï pour l'Europe, qui présente une approche différente de l'Aïkido. Cependant, la méthode d'Aïkido de 1956, par Tadashi Abe et Jean Zin, consacre une grande partie aux Atémi (frappes) de poings comme de pieds. On y retrouve les déplacements de base et, parfois, des vieux termes comme Ikkajo ou Sankajo (équivalent de Ikkyo, Sankyo) en rapport avec l'origine technique de l'Aïkido. Cette méthode ne présente que peu de similitudes avec l'Aïkido pratiqué de nos jours.
Il faudra attendre 1959 avec le retour du Japon de André Nocquet pour découvrir l'évolution des techniques de Ô Senseï : les cinq principes (Ikkyo, Nikyo, Sankyo, Yonkyo, Gokyo qui deviendront le Kata de l'école Nocquet) et une pratique plus souple avec des Kote Gaeshi et autres Kaïten Nage plus enroulés.
Pour Jean-Daniel Cauhepé, qui fondera l'école d'Aïkido de Sumikiri (Sumi = angle, Giri = couper), les techniques d'avant-guerre plus proches du Daïto Ryu correspondent à un " Aïkido carré ", ceux de la deuxième génération de Maîtres à un Aïkido triangulaire, plus en rapport avec les aspirations philosophiques de Ô Senseï. L'Aïkido circulaire introduit par M. Nocquet, puis enseigné par les maîtres de la troisième génération, comme M. Noro, M. Tamura, respectivement arrivés en France en 1961 et 1964, correspond à l'expression du message de Ô Senseï.
D'après les dossiers de Karaté Bushido de juillet 1999.
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