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vendredi 22 mars 2013

L'Aïkido : ni sport de combat, ni art martial mais véritable Voie Martiale

Chronique d'octobre 2008.

L'Aïkido est un art martial Japonais. Pour l'institution française, Il fait partie des sports de combat et il existe un brevet d'état d'éducateur sportif d'Aïkido délivré par le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Ainsi, il est classé dans les sports et les activités physiques.
L'Aïkido a connu un essor important depuis sa création au milieu du vingtième siècle. Très vite, cet art martial s'est répandu à travers le monde grâce aux experts qui se sont voués à sa diffusion en Europe comme en Amérique, ainsi que sur presque tous les continents. Nous pouvons aujourd'hui constater une grande diversité des pratiques selon les styles ou courants, y compris dans un même pays, voire dans une même ville, le nombre de courants, écoles et fédérations existants en est une preuve incontestable.
Mais l'Aïkido ne peut être classé comme un simple sport. Les sports se pratiquent quasiment de manière identique d'un club à l'autre, d'un pays à l'autre, si bien que des compétitions ou rencontres sportives peuvent avoir lieu à tous les niveaux, départementaux, régionaux, nationaux et internationaux. La principale raison est que, dans le domaine du sport, les règles de jeux et l'organisation des championnats sont fixées et définissent la pratique.
Or, l'Aïkido est une discipline sans compétition. Lors de l'étude des techniques, les rôles d'attaquant et de défenseur sont bien définis. De surcroît, c'est toujours l'attaquant qui perd par principe en développant un travail de Ukemi qui lui permet de suivre la technique sans se blesser. Et si les techniques sont appliquées avec un principe de respect de l'intégrité des protagonistes, elles peuvent être redoutables et mettre définitivement un adversaire hors de combat. C'est une des raisons pour laquelle il n'y a aucun combat de compétition organisé.
Nous ne pouvons pas classer l'Aïkido dans les sports de combat. Les règles du sport tendent à donner les mêmes chances à tous les participants par la définition des catégories de poids, d'âge comme de sexe. Or, dans l'art de la guerre a t-on déjà fixé des règles visant à réduire les avantages du nombre, du terrain ou de la technologie des ennemis ? Non, tout au contraire: le plus fort profite des faiblesses adverses.
À l'opposé du Judo ou du Karaté, pour ne rester que sur des sports de combats à mains nue d'origine japonaise, les catégories n'existent pas en Aïkido, seuls les cours enfants et adultes sont spécifiquement adaptés.
Ainsi seul le terme « activité physique » semble le relier au mot « sport » et, si la pratique de l'Aïkido nécessite l'usage du corps et permet une amélioration des aptitudes physiques, son objectif n'en est pas le développement. D'ailleurs, il est impensable de croire ou de vouloir croire à une amélioration continue des capacités physiques d'un individu: nous savons bien que nous ne sommes pas éternels et qu'une baisse de ces capacités nous attend avec le temps.
Il faut de nombreuses années de pratique pour arriver à la maîtrise technique, en général estimée au 4° Dan. Au delà, les grades sont exemptés d'examen technique et nous parlerons d'expertise et de haut niveau. Ainsi l'expert en Aïkido ne l'est souvent qu'à un âge auquel le sportif de haut niveau ne l'est plus. Nous savons que l'Aïkido peut être pratiqué à des âges avancés et qu'il est même possible d'adapter sa pratique à un handicap, parce que la technique va utiliser au maximum le potentiel du partenaire avec le minima de ses propres compétences physiques : L'Aïkido utilise “la force de l'autre” et pendant que l'activité physique adaptée permet un entretien du corps en retardant la baisse des capacités physiques, les qualités techniques augmentent et compensent le déficit corporel. Ce principe se nomme SHIN GI TAI, l'Esprit, la Technique et le Corps.
La pratique mixte Hommes-Femmes et l'absence de catégories tendent à développer une pratique ou l'on cherche à parfaire une technique avec différents partenaires. L'étude technique tend à nous préparer au combat, puis nous invite à aller au-delà en se donnant les moyens d'éviter l'affrontement par une résolution pacifiste des conflits. Il est à noter ici une différence notable entre pacifique et pacifiste : le pacifique se refuse à la guerre, le pacifiste est prêt à l'utiliser pour obtenir la paix. Le terme « art martial » semble donc plus adapté. Mais si l'Aïkido suit la maxime “pour faire la paix, prépare la guerre” il insiste sur le fait que cette préparation ne doit pas aboutir au conflit. Un parallèle peut alors être fait avec les moines Shaölin: l'art martial permet de se défendre d'éventuelles attaques et sa pratique permet une activité physique bénéfique pour le corps comme pour l'esprit.
La recherche d'un idéal harmonieux passe par une recherche artistique dans la réalisation du geste. Bien souvent, l'Aïkido est assimilé à une danse. Ce sentiment est sûrement dû à l'exécution harmonieuse des techniques, la répartition des rôles prédéfinis entre Tori et Uke et la difficulté pour un observateur non initié d'associer Martialité et Beauté parce que, pour l'inconscient collectif, le geste guerrier ne peut pas être porteur de beauté. Mais c'est oublier l'origine japonaise de l'Aïkido et les siècles passés à cultiver la beauté et l'harmonie dans les plus vastes domaines y compris dans celui de l'art de la guerre. La recherche d'un idéal de beauté englobe une bonne part d'universalité, ce qui justifierait de son développement dans des pays aux contextes socio-culturels très différents.
En tant qu'art, il est plus facile de comprendre que, malgré des outils techniques communs, son expression diffère d'un artiste à un autre, d'un maître à un autre. Un parallèle peut être fait avec les artistes peintres qui utilisent les mêmes supports et les mêmes peintures et qui, dans l'expression d'un même sujet, livreront un tableau différent d'un artiste à l'autre.
Chaque art demande travail et effort. Chaque art possède ses propres techniques, ses propres caractéristiques ainsi que ses propres principes. Lorsque son étude s'applique à décortiquer tous ses aspects, une approche scientifique est alors possible. On peut alors classifier, établir une nomenclature, étudier. L'étude scientifique peut permettre la compréhension de principes, mais elle ne garantit pas de pouvoir les appliquer. Et à l'inverse l'artiste, quant à lui, peut être limité par la non connaissance des techniques ou des principes.
Ainsi la mise en pratique par la pratique elle-même est fondamentale et nécessaire à l'approfondissement de l'art. La progression d'un pratiquant passe alors par l'évaluation quantitative et qualitative de sa pratique. Il lui est ainsi demandé un savoir-faire et un savoir-être qu'il devra développer.
Entre connaissances et compétences, il lui faudra trouver un juste milieu. L'Aïkido est alors, au delà de l'art martial, une véritable Voie que l'on peut choisir de suivre toute une vie, une Voie de la réalisation de l'être.

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