Qu'un
faible puisse remporter la victoire sur un fort est une possibilité
induite par les principes de l'Aïkido, notamment par la
non-opposition, le retournement de la force de l'attaquant contre
lui-même et l'utilisation correcte du corps pour activer le Ki,
fabuleuse énergie qui peut permettre de dépasser le potentiel de
force d'un adversaire.
Souvent
ignoré pour ne pas risquer d'orienter la pratique vers un travers
« pseudo-ésotérique » ou d’affirmer son ignorance à
son sujet, le Ki reste aujourd'hui fréquemment un tabou dans les
courants officiels. S'il apparaît comme une spécificité de
l'Aïkido, il est présent dans nombre de Budo
japonais.
Lorsque
j'ai commencé l'Aïkido et interrogé des enseignants sur le Ki, on
m'a souvent répondu qu'il ne fallait pas le chercher spécifiquement,
qu'il était inclus dans la pratique et que les questions
trouveraient leur réponse en temps voulu. L'un d'eux me répondit
plus précisément : « Pratique en respectant les
principes et, que tu en parles ou non, de toute façon il se mettra
en œuvre naturellement. »
Aujourd'hui
je reconnais dans cette réponse une grande pertinence et si le
« naturellement » vient beaucoup plus facilement avec 30
ans de pratique, la durée de pratique n'est pas la seule donnée car
on peut pratiquer toute une vie en passant à côté de l'essentiel.
Qu'est-ce
que le Ki ? Peut-on le développer ? Comment l'activer dans
la pratique ?
" L'Énergie,
le souffle vital, est une force en rapport avec l'essence de la vie.
Elle peut être considérée comme un principe qui active l'univers.
Source de vitalité, elle assure la cohésion des êtres et des
choses.
C'est
aussi la dynamique du Taö, le Yin et le Yang. Elle est partout, tout
le monde la possède. La seule difficulté est de la reconnaître
(étymologie-logiquement,
reconnaître = naître de nouveau avec), de la laisser agir, de la
contrôler. Sa disparition entraîne le chaos, la mort des organismes
vivants ainsi que la destruction de la matière. "
(extrait
de Ki, Chi, Prâna, Ankh, Pneuma, Spiritus ou l'Énergie Vitale
afficher)
"
Énergie potentielle du corps, le Ki prend son essence dans la vie
même et ses manifestations sont diverses : volonté, endurance,
pouvoir de persuasion, puissance vitale.
L’utilisation
de ce courant énergétique consiste, dans les techniques d’Aïkido,
à laisser couler le Ki le long des bras en le projetant à
l’extérieur par le bout de chaque doigt, comme l’eau circule
dans un tuyau pour jaillir à l’extérieur, à son extrémité.
L’art de tirer parti de cette puissance intérieure permet alors de
canaliser et de dominer la force agressive de l’adversaire.
L’esprit guide
le corps et seule la parfaite coordination des capacités mentales et
des moyens physiques permet d’utiliser le Ki. Sans intervention de
l’esprit, la résistance physique s’oppose uniquement à la
puissance adverse et la plus grande des deux forces l’emporte. La
puissance de l’esprit multiplie les possibilités physiques en les
entraînant dans un flot énergétique qui englobe et submerge la
force brutale de l’adversaire. Le corps et l’esprit se confondent
alors pour exécuter le mouvement. "
(extrait de «
Aïkido méthode nationale » de Nobuyoshi Tamura Senseï.
afficher
)
" L'équilibre
(relatif) du In et du Yo est indispensable à la bonne santé d'un
individu comme à celle du monde. Plusieurs facteurs comme le stress,
l'anxiété ou une alimentation déséquilibrée peuvent affecter le
flux de ces énergies et inhiber ainsi la circulation du Ki. Dans la
langue japonaise, santé et maladie se formulent Genki (bon Ki) et
Byoki (Ki malade). En acupuncture, l'application d'aiguilles le long
des méridiens stimule et contrôle le Ki, en attirant l'énergie In
ou Yo vers les régions où elles sont insuffisantes ou en les
dispersant lorsqu'elles sont en excès. "
" Pour
tenter de comprendre le Ki (comprendre = prendre avec soi), il faut
tenter de le replacer dans son contexte culturel d'origine : le mot
Ki au Japon est fréquemment utilisé, mais rarement tout seul : Gen
Ki (bon Ki = santé), Byo Ki (malade), Ki Ni Iru (entrer dans le Ki =
plaire), Ki Mochi (posséder le Ki = sentiment, humeur, état
d'esprit), Ki Fu (le vent du Ki = disposition d'esprit) en sont
quelques exemples.
Le
Ki est immatériel, il est l'essence de toute chose. Il est la
manifestation de la vie. Chaque être reçoit du Ki à sa naissance:
s'il accorde son Ki avec le Ki universel, sa santé sera bonne. "
" Dans
les arts martiaux comme en Zazen, si ni la posture ni la respiration
ne sont bonnes, il est impossible d'avoir un bon Ki. Il faut toujours
que la puissance énergétique, la force, la conscience s'harmonisent
sans tension pour que le Ki soit fort : une respiration correcte
harmonise tout cela et alimente le Ki, qui est l'énergie vitale.
… L'expiration
crée la liaison qui équilibre la conscience et la posture. Cette
activité déclenche l'impulsion équilibrante entre les muscles, les
nerfs, l'hypothalamus et le thalamus.
...
Entre l'esprit et le corps, l'esprit et la posture, l'esprit et la
technique, la respiration établit la liaison. Finalement, posture et
respiration s'unifient. La respiration devient Ki (l'énergie, le
ressort), comme le Ki d'Aïkido. "
(extrait
de Zen et Arts Martiaux de Taisen Deshimaru aux Éditions Albin
Michel.)
" Dans
le travail de l'Aïkido, comme dans celui du Taï Chi et d'autres
encore, la souplesse est la pierre angulaire de toute progression. La
première étape est la suppression de la force rigide par
relâchement et décontraction, pour acquérir la souplesse
nécessaire à l'apprentissage technique. Vient ensuite le travail
sur la densité, à ne pas confondre avec la force rigide. Cette
étape permettra de réaliser les techniques de manière rigoureuse.
La dernière étape sera le travail d'alliance entre souplesse et
densité, permettant un accès à l'énergie interne.
La
technique devient puissante par l'utilisation correcte du Ki. Dans le
geste martial, la détente est soudaine, explosive, puissante. Le
son, en accord avec le geste, peut en augmenter l'intensité: c'est
le Ki-Aï.
L'alchimie
de l'Aïkido vient de la surenchère du travail de l'énergie. La
pratique entière est basée sur la dynamique du Taö : Uke devient
Tori, Tori devient Uke, exécute Omote et Ura, activant ainsi le Yin
et le Yang qui s'opposent, se relient et se contiennent mutuellement.
L'énergie peut alors circuler pleinement dans et par cette
dynamique.
Ce
que nous enseigne l'Aïkido est que l'on ne peut s'élever seul, que
Tori n'est rien sans Uke, et qu'il est vain de vouloir maîtriser
l'énergie si l'on ne la laisse pas circuler. "
(extrait
de Ki, Chi, Prâna, Ankh, Pneuma, Spiritus ou l'Énergie Vitale
afficher)
J'avais
conclu ce dernier article par : " Avoir une pratique
régulière et entière est la seule et véritable voie où toute la
mécanique énergétique se mettra naturellement en application, sans
se poser de questions particulières. "
A
cette époque, je ne m’étais pas posé la question de savoir si
les enseignants que je suivais, ou leur maître, développaient un
travail sur le Ki, ceci me paraissant " obligatoirement "
inclus dans la pratique. Mais aujourd'hui je sais qu'il est possible
de passer à côté si l'enseignant n'y oriente pas son propre
travail ainsi que celui de ses élèves.
On
peut toujours continuer à creuser un puits avec l'espoir de trouver
de l'eau. Mais pour s'y abreuver, il faut atteindre l'eau. Il est
donc préférable d'apprendre à creuser puis de le faire dans un
lieu propice. Il en va de même avec le Ki.
Merci Marc.
RépondreSupprimerMichel Vhm