Jeune
Shodan, j'avais participé à un stage d'Aïkido animé par deux haut
gradés. Avec plusieurs de mes Doaï (compagnons d'étude), nous
mettions tout notre cœur à reproduire avec vigueur et enthousiasme
les gestes techniques proposés, ce qui nous procurait un sentiment
de réussite. Les deux experts nous observaient avec attention
lorsque l'un deux commenta : « Ils sont tous
décentrés ! ». Je ne me souviens pas exactement des
termes employés par le second expert, mais il approuvait largement
le commentaire de son confrère.
Si
cet épisode m'offrit une grande motivation pour définir avec plus
de précision la notion de centre et de centrage, je compris aussi
qu'en tout état de cause ils observaient non pas ce que nous
faisions mais comment nous mettions en œuvre la réalisation d'un
geste technique dans notre pratique de l'Aïkido.
Plus
de vingt ans après, je sais aujourd'hui que ma lecture des
mouvements et des corps a fortement évolué avec ma pratique. Je
constate souvent que les techniques sont encore appliquées avec trop
de force, parfois sans la mise en oeuvre de principes techniques
pourtant énoncés par ceux-là même qui en manifestent l'absence
dans leurs démonstrations.
A
priori, exécuter un mouvement « en laissant couler le Ki »
(cf.extrait de «Aïkido méthode nationale» de feu Nobuyoshi Tamura Senseï) n'est pas au
programme de toutes les études, voire tout simplement oublié.
Pourtant,
au vu des grades affichés (donc délivrés par notre CSGDE nationale
puisque tout autre grade non délivré par cette commission n'est pas
officiel en France), il semble possible de pratiquer jusqu'à un
« très haut niveau » sans se soucier du Ki de l'Aïkido.
Ainsi
l'Aïkido peut être une voie sans Ki.
Il
reste donc « Aï...Do ». Mais on pourrait aussi chercher
la cohérence du " Aï " lorsque la mise en
application des techniques fait fi des principes, notamment celui
d'Aïki qui en théorie nous accorde à notre partenaire et garantit
le respect de l'intégrité physique de celui qui nous prête son
corps pour réaliser une technique.
Sans
Ki, sans Aïki, il ne reste même plus Do, mais comme
le dit le dicton : « Au royaume des aveugles, les borgnes
sont rois ». Il reste donc à espérer que les aveugles seront
nombreux pour satisfaire l'Ego des borgnes.
Pour
tous ceux qui ouvrent les yeux avec un regard critique, la recherche
de l'Aïki dans la pratique continue avec conviction. Aïki est une
porte vers la compréhension du Ki qui n'est ni mystique, ni
mystérieux (cf. Le ki... Énergie ou auréole de mysticisme).
" L'Aïkido
nous permet de "toucher du doigt" le Ki, de le reconnaître
(dans le sens de renaître avec) et de le partager. Il faut des
années de pratique pour que le corps digère ce que l'intellect
croit comprendre. La simple pratique "sportive" ne le
permet pas et il faut aller chercher une résonance en Soi et en
l'autre, ce qui est possible si l'Esprit accompagne la pratique. "
(extrait de Kokyu et Ki.)
La
voie quant à elle n'est ni facile ni difficile, elle réclame
assiduité et courage pour progresser encore et encore.
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