Texte paru dans Haru no Soyo Kase en mai 2005 et inclus dans "Le souffle du Budo"
Une
des spécificités de la pratique de l’Aïkido est l’absence de
compétition. De cette situation naît une relation particulière, où
l’adversaire s’efface pour devenir partenaire.
Cette
situation est souvent ambiguë pour le débutant ou le néophyte qui
s’attend à une relation d’opposition propre au sport de combat.
Cependant, même pour le pratiquant plus avancé, le rôle de Uke
(celui qui attaque et reçoit la technique) reste parfois flou,
amenant excès ou absence de réactivité. La relation Uke / Tori est
en effet particulière en Aïkido. Elle répond à la philosophie et
au mode de travail basé sur un échange constructif visant à
l’amélioration et la progression technique, plutôt que la volonté
d’être le plus fort en combat.
Le
premier rôle du Uke est d’attaquer selon le mode choisi. Cette
attaque servira donc à Tori pour exécuter et perfectionner les
techniques, à charge pour lui de respecter l’intégrité physique
comme morale du Uke. Il s’agit donc de permettre à Tori de
construire sa technique mais aussi de construire une réaction
corporelle adaptée à la technique pour Uke, lui permettant de subir
en minimisant les risques de blessures.
Ceci
sous-entend une adaptabilité de la pratique en fonction du niveau
technique de Tori et Uke et c’est toujours au plus gradé de
prendre soin de son cadet.
Lorsque
Uke est le plus gradé, il doit adapter son attaque et suivre la
technique de Tori, il peut ainsi la guider sans la précéder et,
sauf indication contraire, s’y soumettre. Cet aspect est sûrement
le plus difficile pour Uke parce qu’il suppose une abnégation du
niveau technique du Uke devant se rabaisser au niveau de Tori.
Pourtant ceci élève le niveau d’adaptation et permet une «
distorsion » du temps qui rend possible une décomposition du
travail
et par-là même son perfectionnement.
Lorsque
Uke est moins gradé, il doit donner le maximum de ses capacités et
faire confiance à Tori qui en retour se doit de travailler en
adaptant sa technique toujours dans le respect d’intégrité.
La
plupart du temps l’étude se fait selon le mode Ippan Keiko
(pratique usuelle), mais nous pouvons varier le travail en Ju no
Keiko (pratique très souple) ou en Go no Keiko (pratique dure) où
les comportements de Uke seront alors différents. Cette
diversification du travail doit alors permettre un enrichissement du
répertoire comportemental.
La
permutation des rôles et l’étude de la technique sous les deux
aspects sont indispensables et indissociables. Ce que nous enseigne
l’Aïkido, c’est que nous ne sommes rien sans l’autre, sans un
Uke pour nous permettre de progresser. Et Progresser dans son rôle
de Uke, c’est progresser doublement sur la voie Aïki.
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